En matière fiscale, l’article 1787 du Code général des impôts (CGI) prévoit un régime de responsabilité solidaire pour les créanciers dans certaines situations. Cet article vise à protéger les intérêts de l’administration fiscale en cas de fraude ou de manœuvres dilatoires de la part des contribuables. Dans cet article, nous allons analyser les implications pour les créanciers et les conditions requises pour engager leur responsabilité en vertu de cet article.
Le champ d’application de l’article 1787
L’article 1787 du CGI concerne spécifiquement les créanciers qui perçoivent des produits soumis à l’impôt sur le revenu (IR) ou à l’impôt sur les sociétés (IS) au titre des revenus distribués. Il s’agit notamment des dividendes, intérêts et autres gains générés par les placements financiers. L’article 1787 est donc applicable aux créanciers qui reçoivent ce type de revenus, qu’ils soient personnes physiques ou morales, résidents français ou étrangers.
Le dispositif vise également les créanciers qui perçoivent des sommes au titre d’une cession d’entreprise, notamment lorsqu’il y a un transfert de propriété ou une fusion-absorption. Enfin, l’article 1787 s’applique également aux créanciers bénéficiaires de sommes versées en exécution d’un contrat d’assurance-vie, lorsque le souscripteur est une personne morale soumise à l’IS ou une personne physique domiciliée à l’étranger.
Les conditions de mise en œuvre de la responsabilité solidaire
Pour que la responsabilité solidaire des créanciers puisse être engagée en vertu de l’article 1787, plusieurs conditions doivent être réunies. Tout d’abord, il faut que les sommes perçues par le créancier soient soumises à l’obligation de retenue à la source. Cette obligation incombe généralement aux personnes qui versent les revenus (débiteurs), et consiste à prélever directement sur les sommes dues un pourcentage correspondant à l’impôt dû.
Ensuite, il convient de démontrer que le débiteur n’a pas respecté cette obligation de retenue à la source, soit en ne prélevant pas du tout l’impôt, soit en ne reversant pas les sommes prélevées à l’administration fiscale. Enfin, il doit être établi que le créancier a eu connaissance de la fraude ou des manœuvres dilatoires du débiteur. Autrement dit, il ne suffit pas que le débiteur ait commis une fraude ; encore faut-il que le créancier en ait été informé et qu’il n’ait pas pris les mesures nécessaires pour éviter d’en tirer profit.
Les conséquences pour les créanciers
Lorsque les conditions susmentionnées sont réunies, l’administration fiscale peut mettre en œuvre la responsabilité solidaire des créanciers en vertu de l’article 1787 du CGI. Concrètement, cela signifie que le créancier devient redevable de l’impôt qui aurait dû être prélevé à la source par le débiteur. Il s’agit donc d’une sanction financière importante pour le créancier.
Cependant, cette responsabilité solidaire est limitée aux seuls impôts et pénalités dus par le débiteur. Ainsi, le créancier ne peut pas être tenu responsable des autres dettes fiscales du débiteur, telles que l’impôt sur la fortune ou la taxe d’habitation. Par ailleurs, la responsabilité solidaire ne concerne que les sommes perçues par le créancier ; elle ne s’étend pas aux autres créanciers du débiteur qui n’auraient pas été informés de la fraude.
La prévention des risques pour les créanciers
Face à ces risques, il est essentiel pour les créanciers de prendre certaines précautions afin de minimiser leur exposition à une éventuelle mise en œuvre de leur responsabilité solidaire. Ces précautions passent notamment par une vigilance accrue quant au respect des obligations fiscales par leur débiteur.
Ainsi, il est recommandé aux créanciers de vérifier régulièrement que leur débiteur procède bien à la retenue à la source des impôts et qu’il reverse les sommes prélevées à l’administration fiscale. En cas de doute, il est possible de demander un certificat de situation fiscale, qui atteste du respect par le débiteur de ses obligations en matière de retenue à la source.
Enfin, il convient pour les créanciers de se tenir informés des évolutions législatives et jurisprudentielles en matière fiscale, afin d’adapter leur comportement en conséquence et d’éviter tout risque de responsabilité solidaire.
En résumé, l’article 1787 du CGI instaure un régime de responsabilité solidaire pour les créanciers qui perçoivent des revenus soumis à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés, lorsque certaines conditions sont réunies. Cette responsabilité peut avoir des conséquences financières importantes pour les créanciers concernés, d’où la nécessité pour eux de rester vigilants quant au respect des obligations fiscales par leur débiteur et de prendre toutes les précautions nécessaires pour minimiser les risques.